EXCELSIOR ( Sebastien Rio).

Seb pénétra tranquillement dans la vaste écurie, plongée dans la pénombre. Il s'arrêta un instant pour écouter les divers bruits émis par les chevaux installés dans la double rangé de boxes qui occupait ce bâtiment. Les crissements de la paille, le bruit sourd d'une mastication régulière, un doux ronflement des naseaux, parfois un hennissement plus intense, tous ces bruits étaient universels, et se retrouvaient dans n'importe quelle écurie du globe. Grâce à ça, la plupart des cavaliers pouvaient se sentir chez eux dès qu'ils entraient dans une écurie.
Seb laissa échapper un soupir, content de retrouver ce lieu familier et apaisant, après l'agitation qui avait entouré son départ de Bretagne et son arrivée dans l'académie : à San Francisco, s'il vous plait !
Quelques chevaux, un peu plus curieux que les autres, passaient leur tête par-dessus la demi-porte de leurs boxes, scrutant le nouveau venu avec attention. Le responsable qui avait renseigné le jeune homme lui avait indiqué que son étalon (un beau bai, avec un peu d'âge, mais toujours autant d'énergie que quand il était poulain, à ce qu'on lui avait dit) occupait le deuxième box à droite après l'entrée.
Le brunet tourna sa tête vers le box en question, pour voir si son nouveau compagnon faisait partie ou non de ces incorrigibles commères que sont parfois ces grosses bestioles poilues ! En effet, il était là, ses deux petites oreilles pointées vers lui, intrigué par ce bipède qu'il ne connaissait pas encore ...

Sébastien sourit : il aimait les chevaux à défi, qu'il fallait apprivoiser pendant des années avant qu'ils vous accordent un minimum de confiance et de reconnaissance, mais il appréciait également ceux qui, plus sereins et proches de l'homme, se montraient curieux, volontaire, prêt à découvrir plein de nouvelles choses sans se poser de questions.
En quelques enjambées de ses grandes jambes, il se retrouva en face du grand bai, qui l'avait observé s'approcher, tournant un peu sa jolie tête fine et bien dessinée pour éviter de perdre de vue ce nouvel arrivant dans l'angle mort qui se trouvait devant son bout du nez. Il était bien proportionné, assez rond, mais surtout à cause de sa musculature harmonieuse. Il avait, en bon étalon, une encolure plutôt forte, qu'il redressait fièrement, jaugeant son nouveau propriétaire de toute sa hauteur. Mais le jeune breton était lui aussi plutôt grand, et pas facilement impressionnable.

Il sourit, et souffla :
-Relax bonhomme, j'viens pas pour te faire concurrence !
Les juments ne m'intéressent pas spécialement !
Bien entendu, le grand bai ne pouvait pas comprendre les paroles du jeune homme, mais, comme tous les chevaux, il était sensible aux émotions, à l'état d'esprit et aux expressions de son cavalier, et donc au sourire de Sebounet.
Il ronfla doucement, encore méfiant bien sûr, mais déjà plus téméraire, il avança doucement ses naseaux pour sentir l'odeur du breton. Celui-ci se décala un peu pour se placer légèrement sur le côté, de façon à être bien visible par l'étalon, et pouvoir commencer à lui caresser l'encolure.
Il posa tranquillement sa paume sur la robe baie du stal', environ au milieu de l'encolure, avec un contact franc mais doux. Excel n'étant plus vraiment un poulain sauvage, il se laissa faire sans broncher, gardant à l'oeil ce jeune homme qui s'intéressait à lui, mais qui ne semblait pas lui vouloir de mal. Sébastien commença donc à caresser avec douceur l'encolure musclée de son cheval, remontant sans brusquerie jusqu'à la nuque, par des petits mouvements circulaires. Il gratouilla un instant Excelsior à cet endroit précis, juste à la base des oreilles, une attention généralement apprécié des équidés qui ne peuvent, vous vous en doutez bien, se gratter à cet endroit ! Ne dérogeant pas à la règle, le joli bai arrondit un peu son encolure pour mieux profiter de la sensation, ce qui fit rire le jeune brestois :
-Alors comme ça, tu aimes les gratouilles toi ?

Excelsior secoua soudain la tête, comme pour confirmer l'impression du jeune homme, lui arrachant par la même occasion un nouvel éclat de rire. Il posa avec précaution son autre main sur le chanfrein de sa bête tout en continuant à lui gratouiller l'encolure. N'appréciant pas trop, Excelsior chercha un peu à se débarrasser de cette chose posée sur sa tête et qu'il ne voyait pas. Seb sourit (il s'y attendait un peu), et lui parla doucement pour le calmer, sans pour autant ôter sa main. Il fonctionnait comme ça depuis que sa cousine l'avait branché sur les méthodes dites "éthologiques", et en particulier celle de la Cense : ne pas donner le confort (ici, enlever sa main) tant que le cheval n'a pas trouvé la bonne solution, c'est-à-dire, comme vous l'avez surement deviné, tant qu'il n'acceptait pas le contact sur son chanfrein. L'étalon, après avoir tenté par quelques "secouages" de tête de s'en débarrasser par lui-même, comprit vite qu'il avait bien plus intérêt à rester sage ^^. Devant ce retour au calme, Seb félicita son étalon, et releva légèrement sa main, puis caressa avec douceur le chanfrein du grand bai, pour lui montrer qu'il avait eu raison d'accepter cette main, qui, au final, lui faisait plus de bien que de mal ! Il poussa néanmoins un léger soupir que Seb, bien qu'au courant des délires antropomorphiste de nombre de cavaliers, ne put s'empêcher d'interpréter comme une légère protestation :
-Bah alors loulou, t'aimes pas les câlins ? Mais rassure-toi, ça finira par te plaire, fais moi confiance !

A chaque nouvelle parole du jeune homme, les oreilles du poilu se tournaient rapidement vers lui, ne perdant pas une miette de ce que pouvait bien raconter Sébastien. L'étalon se montrait très attentif, calme mais réagissant au moindre mouvement ou au moindre bruit ! Le breton appréciait cet esprit curieux et intrigué par tout, d'autant qu'Excel n'était pas particulièrement jeune. C'était en tout cas une qualité qui leur permettrait sans doute de pouvoir travailler rapidement la connexion et la confiance que Seb souhaitait toujours avoir avec sa monture. Mais c'était bien beau de faire des papouilles à son cheval comme ça, l'heure tournait, et il fallait encore que le Frenchie règle une tonne de paperasse à l'accueil, rassure ses parents (et oui, le cordon ombilical est dur à couper quand on est fils unique ><) et s'installe dans sa nouvelle chambre ... Bref, il était temps qu'il se remue un peu. Après une dernière petite caresse sur l'encolure, il s'éloigna de quelques pas, puis se retourna pour jeter un dernier coup d'œil au loustic. Celui-ci le regardait partir d'un air intrigué : comment ça, on venait le voir, le caresser et on repartait sans lui avoir mis un mors dans la bouche, une selle sur le dos et un cavalier par-dessus ? Il pointa les oreilles vars cette nouvelle cascade de légers échos qu'émettait souvent ce drôle de jeune homme ... En effet, son expression avait une nouvelle fois amusé le beau brun, qui revint vers le bai, et lui posa avec délicatesse la main sur l'encolure :
-Et oui, bonhomme, avec moi, tes habitudes risquent d'être un peu tourneboulées ... je pense que tu vas t'y faire, va !
Il jeta un coup d'œil dans le box : tout était bien en ordre pour que son cheval puisse passer une nuit confortable et tranquille !
-Allez, profite bien, et soit en forme quand les choses sérieuses commenceront !

Réagissant au ton plus péremptoire que le brunet avait employé lors de sa dernière phrase, l'étalon se redressa un peu, portant haut sa p'tite tête fière, donnant à s'y méprendre l'impression qu'il avait compris ! Sur un dernier sourire, Seb quitta l'écurie, sous le regard inquisiteur du grand bai, qui ne se détourna que lorsque les lourdes portes de l'écurie se refermèrent sur la grande silhouette du garçon.


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